Le onzième témoin à charge du procès de Jean-Pierre Bemba qui se tient devant la Cour pénale internationale (CPI) a déclaré aujourd’hui que les troupes libyennes, qui avaient participé au conflit faisant rage dans la capitale centrafricaine en 2002 et 2003, n’avaient commis aucune atrocité sur les civils.
Témoignant sous le pseudonyme de ‘‘témoin 73’’, il a déclaré, « Personne n’a jamais entendu dire que les Libyens étaient venus dans les quartiers et avaient commis des actes de violence ou qu’ils avaient battu ou attaqué quelqu’un. Les Libyens ne l’ont jamais fait ».
Lors de l’interrogatoire mené par l’avocat de l’accusation Hesham Mourad, le témoin a raconté l’arrivée des Libyens dans une banlieue de Bangui, la capitale de la République centrafricaine (RCA), le 22 novembre 2002. Le témoin a bénéficié d’une déformation numérique du visage et de la voix ainsi que d’un pseudonyme afin de ne pas dévoiler son identité de crainte qu’il fasse l’objet d’attaques répétées pour avoir participé au procès.
« Y avait-il des forces étrangères impliquées dans ce conflit ? », a demandé M. Mourad.
« Il y avait des libyens de la CEN-SAD », a répondu le ‘‘témoin 73’’. La CEN-SAD (Communauté des États Sahélo-Sahariens) est une organisation internationale de 21 états créée en 1998 avec le ferme soutien du gouvernement libyen.
Le témoin a ajouté, « J’étais présent à l’époque. Je me suis rendu à la route principale pour observer ce qui s’y passait. Il y avait des tanks blindés qui traversaient pour aller combattre François Bozizé. Les troupes étrangères étaient libyennes, des membres de la CEN-SAD ». À l’époque où les troupes de M. Bemba auraient commis des crimes contre les civils centrafricains, elles étaient présentes dans ce pays pour aider le président en exercice Ange-Félix Patassé à combattre une tentative de coup d’état menée par M. Bozizé.
Le témoin a expliqué aujourd’hui que les ‘‘troupes libyennes’’ ne s’étaient pas rendues dans la banlieue PK 12 de Bangui. « Elles n’avaient effectué aucune patrouille jusqu’au PK 12. Elles étaient dans leurs bases et ne réalisaient aucune patrouille », a-t-il déclaré.
Interrogé par M. Mourad sur les vêtements portés par les troupes, le témoin a raconté qu’elles étaient habillées avec des uniformes différents de ceux des forces armées de la RCA, connues sous le nom de Forces Armées Centrafricaines ou FACA.
« Les uniformes libyens étaient différents des uniformes des FACA », a affirmé le ‘‘témoin 73’’. « Ils avaient deux uniformes, un qui était vert foncé mais il y avait aussi une tenue blanche ».
Le témoin a déclaré qu’il ne connaissait pas la langue parlée par les troupes libyennes car ces soldats ne s’étaient jamais mêlés à la population locale. Il a été toutefois catégorique quand au fait que les Libyens n’avaient jamais commis d’atrocités sur les civils. « Personne n’a jamais entendu dire que les Libyens étaient venus dans les quartiers et avaient commis des actes de violence ou qu’ils avaient battu ou attaqué quelqu’un. Les Libyens ne l’ont jamais fait », a indiqué le témoin.
Il a précisé, en revanche, que lorsque les troupes du Mouvement pour la libération du Congo (MLC) avaient pénétré dans le PK12, elles avaient occupé par la force les maisons des civils, obligeant leurs habitants à leur préparer des repas puis elles avaient pillé les biens des citoyens centrafricains.
Les procureurs de la CPI accusent M. Bemba d’être pénalement responsable de deux crimes contre l’humanité (meurtre et viol) et de trois crimes de guerre (meurtre, viol et pillage) qu’il aurait commis en RCA entre le 26 octobre 2002 et le 15 mars 2003. Cette responsabilité pénale présumée découle de son manquement à arrêter ou à punir ses soldats lorsqu’ils ont tué, violé et pillé. Il a nié les accusations.
Le ‘‘témoin 73’’ poursuivra son témoignage demain matin.