Jean-Pierre Bemba in court
qui est Jean-Pierre Bemba Gombo

Glossaire

Responsabilité de commandement

Il s’agit de la responsabilité pénale d’un chef militaire ou d’un supérieur hiérarchique civil faisant fonction de chef militaire pour des crimes commis par des membres des forces armées ou d’autres personnes placées sous son contrôle. Un supérieur peut être considéré comme pénalement responsable même s’il n’a pas donné l’ordre de commettre les crimes. Il suffit que le chef n’ait pas empêché ou réprimé l’exécution des crimes par ses subordonnés.

Pour faire condamner une personne sur la base de la responsabilité de commandement, il faut que l’accusation apporte aux juges la preuve que non seulement des crimes aux fins du Statut de Rome ont été commis, mais aussi que les deux conditions suivantes ont été remplies :

  1. La personne accusée exerçait une autorité et un contrôle effectifs sur ses subordonnés qui ont commis ces crimes.
  2. La personne accusée savait, ou aurait dû savoir :
    • que ses subordonnés allaient commettre des crimes, et n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher l’exécution de ces crimes ;
    • ou que ses subordonnés étaient en train de commettre des crimes, et n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables pour mettre fin à l’exécution des crimes alors même qu’elle se poursuivait ;
    • ou que leurs subordonnés ont commis ces crimes graves, et qu’ils n’ont pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables  pour les punir.

Jean-Pierre Bemba est la première personne accusée à la CPI à être inculpée pour responsabilité de commandement. Le Procureur l’a d’abord inculpé d’avoir directement planifié les crimes présumés avec Ange-Félix Patassé l’ancien président de la RCA. Selon ce scenario, le Procureur devrait prouver que M. Bemba avait l’intention de commettre les crimes présumés. En mars 2009, la Chambre préliminaire a recommandé que le Procureur modifie les charges de responsabilité pénale directe à responsabilité de commandement.  Après le changement par l’accusation de sa demande d’offrir les deux options à la Chambre, la Chambre préliminaire a décidé qu’il y avait seulement assez de preuves pour aller à un procès sur la base de la responsabilité de commandement. Plus particulièrement, la Chambre préliminaire a statué que M. Bemba n’avait pas la connaissance et l’intention nécessaires pour être poursuivi comme co-auteur. Mais la Chambre a trouvé que les charges sur la base de la responsabilité de commandement pouvaient être confirmées car il y avait suffisamment de preuves que :

  1. M. Bemba était un chef militaire et exerçait une autorité et un contrôle effectifs sur ceux qui ont commis les crimes ;
  2. M. Bemba savait que les forces du MLC étaient en train de commettre ou allaient commettre les crimes ;
  3. Et que Mr. Bemba n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher ou mettre fin à l’exécution de ces crimes par les forces du MLC.

Crimes contre l’humanité

Il s’agit de crimes qui sont commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique contre toute population civile. Les crimes individuels figurent sur une liste à l’Article 7 du Statut de Rome. Ils comprennent des crimes tels que le meurtre, l’extermination, le viol, l’esclavage sexuel, la torture et d’autres actes inhumains.

Les crimes contre l’humanité doivent avoir trois éléments principaux :

  • Le crime doit être le produit d’une attaque généralisée ou systématique, non pas d’un incident isolé. S’il est isolé, il doit être lié à des actes multiples, dans la poursuite d’une politique.
  • De tels crimes doivent viser une population civile—si c’est une cible militaire, il ne peut pas s’agir de crime contre l’humanité. Mais l’acte pourrait toujours être un crime de guerre.
  • Le présumé auteur du crime doit avoir connaissance de l’attaque.

Le Procureur a tenté d’inculper Jean-Pierre Bemba pour trois chefs d’accusation de crimes contre l’humanité: meurtre, viol et torture. Cependant, les juges de la Chambre préliminaire ont trouvé qu’il n’y avait de preuve que pour justifier un procès pour les deux chefs d’accusation suivants : meurtre et viol.

Expert judiciaire

Un expert judiciaire est une personne qui, du fait de son éducation, de sa formation et de son expérience peut fournir à la Cour une évaluation, une opinion, ou un jugement dans son domaine d’expertise. Cette connaissance n’est généralement pas connue ou accessible au public. Cette personne doit être approuvée par la Cour et doit normalement témoigner sur des faits, et non sur des questions juridiques. La défense a le droit de contester les qualifications d’un individu présenté par l’accusation comme expert judiciaire.

Procès équitable

Procédure judiciaire qui est conduite de manière à être conforme aux concepts fondamentaux de justice et d’égalité. Parmi les procédures équitables, il y a :

  • Le droit de l’accusé à une audience publique, sous réserve des mesures ordonnées par la Cour en vue de la protection des victimes et des témoins. Dans le procès de M. Bemba, certains témoins peuvent témoigner avec des mesures de protection lorsque la Cour estime que leur témoignage peut les exposer à des risques pour leur sécurité.
  • Présomption d’innocence jusqu’à ce que sa culpabilité ait été établie.  M. Bemba est considéré comme non coupable et la Cour le considère comme non coupable jusqu’à ce que, et à moins que, l’accusation prouve les charges qui pèsent sur lui. Il ne revient pas à M. Bemba de prouver son innocence. L’accusation est tenue d’apporter les preuves de sa culpabilité pour que M. Bemba puisse être condamné.
  • Etre informé de la nature et de la cause des charges contre lui. Lorsque M. Bemba a comparu pour la première fois devant la Chambre préliminaire, il a été informé des crimes qui lui sont imputés en audience publique et on lui a remis un exemplaire du document contenant les chefs d’accusation.
  • Il est du devoir de la Cour de veiller à ce que le procès se tienne sans retard.
  • Etre présent à son procès.  M. Bemba a le droit d’être présent dans la salle d’audience et d’entendre toutes les preuves.
  • Se défendre lui-même ou se faire assister par un défenseur de son choix. M. Bemba a personnellement choisi les avocats devant server comme conseil de la défense. Il s’agit de M. Nkwebe Liriss et M. Aimé Kilolo-Musamba.
  • Se voir attribuer d’office un défenseur sans frais, s’il n’a pas les moyens de le rémunérer. Le Greffe, qui est la section administrative de la CPI, a établi que M. Bemba possède bien des fonds suffisants pour s’acquitter lui-même des frais de sa défense. Cependant, en attendant de recevoir les fonds nécessaires des actifs de M. Bemba, la Chambre de première instance a ordonné au Greffe de payer les frais de défense de M. Bemba. Ces frais seront remboursés à la CPI avec une partie des actifs de M. Bemba.
  • Interroger ou faire interroger les témoins à charge. Après l’interrogatoire principal de chaque témoin à charge, le conseil de M. Bemba a le droit de soumettre le témoin à un contre-interrogatoire. Lorsque M. Bemba présentera sa défense, il aura le droit d’appeler des témoins qui seront interrogés par son conseil.
  • Obtenir la présence et l’interrogatoire de ses propres témoins à décharge. A travers l’Unité d’assistance aux victimes et aux témoins, l’équipe de défense de M. Bemba présentera ses témoins devant la Cour avec l’aide du Greffe. La Cour facilitera l’organisation du voyage des témoins vers La Haye où se tient le procès. La défense de M. Bemba peut obtenir une citation à comparaître pour les témoins qui pourraient montrer peu d’enthousiasme à témoigner, mais que M. Bemba considère comme pouvant être utiles à sa défense.
  • Se faire assister gratuitement d’un interprète s’il ne parle pas ou ne comprend pas la langue utilisée par la Cour. Il y a des interprètes de Cour pour interpréter les témoignages des langues locales vers l’anglais et le français, et de l’anglais au français (et vice-versa). M. Bemba, qui parle le français, comprendra la totalité des travaux.
  • Ne pas être forcé de témoigner contre soi-même ou de d’avouer sa culpabilité.

Gravité

Le Statut de Rome déclare qu’une affaire n’est pas recevable à la CPI si elle “n’est pas suffisamment grave pour que la Cour y donne suite” (Article 17(1)(d)). Le Statut pose cette exigence pour veiller à ce que la CPI concentre ses ressources limitées sur des situations et des cas à travers le monde où les pires crimes sont commis.  Cependant, le Statut ne définit pas le mot ‘gravité’ et laisse aux juges de la CPI le soin de l’interpréter. La défense de M. Bemba a demandé que la Chambre de première instance prononce un non-lieu, en partie parce que selon elle, les crimes présumés ne remplissaient pas la condition de gravité. Mais en juin 2010, la Chambre de première instance a rejeté cet argument ainsi que la totalité de la demande de la défense.

Crimes de guerre

Les guerres sont chaotiques et brutales, mais il existe un corpus de textes de droit international qui essaient de réguler la violence dans les conflits armés. Ces règles ne sont pas destinées à juger les raisons pour lesquelles les guerres existent, mais plutôt, elles fixent les règles de base de la façon dont les parties au conflit doivent se conduire et quels actes ne sont pas permis au cours du conflit. Ces lois visent spécifiquement à sauvegarder les « personnes protégées »—celles qui ne sont pas ou plus engagées dans le conflit. Parmi les personnes protégées, il y a des civils (les enfants et les femmes sont considérés comme particulièrement vulnérables), les soldats malades, et les prisonniers de guerre.  A la CPI, les crimes de guerre figurent à l’Article 8(2) du Statut de Rome. Ils comprennent des crimes tels que le meurtre, le terrorisme, la violence sexuelle, les traitements cruels, et le pillage.

Dans le cas de Jean-Pierre Bemba, le Procureur a d’abord cherché à présenter cinq chefs d’accusation de crimes de guerre : meurtre, viol, torture, atteintes à la dignité personnelle, et pillage. Cependant, le Chambre préliminaire a conclu qu’il y avait seulement assez de preuves pour justifier un procès pour trois chefs d’accusation ; meurtre, viol et torture.


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