Aujourd’hui, le procès pour crimes de guerre de l’accusé Jean-Pierre Bemba a entendu un procureur général de République centrafricaine (RCA) décrire comment ils avaient enquêté sur les abus qui auraient été commis par les membres du groupe armé de M. Bemba.
Firmin Feindiro, le procureur général de la RCA, a expliqué à la Cour la manière dont les autorités judiciaires centrafricaines avaient enquêté sur les auteurs des crimes dans le pays, notamment sur l’ancien président Ange-Félix Patassé, M. Bemba et d’autres fonctionnaires gouvernementaux centrafricains.
M. Feindiro, qui a été un fonctionnaire judiciaire de haut niveau pendant 15 ans et qui a été nommé procureur à Bangui, la capitale de la RCA, le 1er août 2003, a déclaré à la Cour que, en sa qualité de procureur, il avait reçu une lettre de la part du ministère de la justice de son pays le chargeant d’ouvrir une enquêteur sur le conflit de 2002-2003 qui a eu lieu dans son pays. Il a indiqué que cette lettre était accompagnée d’un rapport sur le nombre des victimes des crimes commis pendant cette période.
Le rapport résultait à l’origine d’« examens médicaux » menés par un comité, accueillant notamment le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) en partenariat avec le ministère des affaires sociales centrafricain.
Lors du contre-interrogatoire mené par l’avocat de l’accusation Ibrahim Yillah, M. Feindiro a déclaré qu’il avait par la suite conduit une enquête visant à déterminer la responsabilité des personnes derrière les crimes commis en RCA.
« Des personnes ont été tuées. Des personnes ont été violées. Des biens ont été volés, pillés. Les personnes ont également été blessées », a déclaré M. Feindiro. En outre, a-t-il indiqué, certains des crimes commis ont été « de nature financière ».
Il a également déclaré à la barre que, en raison d’un certain nombre de problèmes, son enquête n’a pas été précédée d’une enquête préliminaire.
« À cause de la guerre, la police judiciaire n’était plus en activité. Il n’y avait plus de matériel, l’armée était complètement désorganisée », a précisé M. Feindiro, qui a témoigné en séance publique à visage découvert. Il a également donné son nom en public, contrairement à la majorité des témoins qui se sont présentés jusqu’à présent pour l’accusation. Le témoin a poursuivi, « Le procureur n’avait aucun moyen à sa disposition pour emmener les personnes sur les lieux où les actes de violence auraient été commis ou pour garantir la sécurité ». Il a ajouté que les victimes s’étaient fait ensuite connaître de manière volontaire lorsqu’elles avaient entendu que des poursuites étaient en cours.
Les victimes, dont beaucoup ont été interviewés en présence de M. Feindiro, provenaient de nombreux quartiers de Bangui et de ses environs. Il a déclaré que la majorité d’entre elles étaient ‘‘perturbées’’. Certaines avaient eu des résultats médicaux indiquant un diagnostic d’infection par le VIH/sida. D’autres ont présenté des difficultés d’élocutions et se sont effondrées pendant l’interrogatoire à cause du viol et des autres abus qu’elles ont endurés de la part des soldats qu’elles pensaient appartenir au groupe de M. Bemba.
M. Bemba a été initialement accusé par contumace par les autorités centrafricaines avant que son procès n’ait été renvoyé devant la Cour pénale internationale (CPI) puisque les fonctionnaires judiciaires de ce pays affirmaient qu’ils n’avaient pas les moyens de l’arrêter et de le juger. Les procureurs de la CPI ont accusé les troupes de M. Bemba d’avoir violé, pillé et tué des civils pendant qu’ils étaient présents en RCA au moment du conflit. Les crimes auraient été commis à Bangui et dans ses environs.
Lors de son témoignage d’aujourd’hui, M. Feindiro a décrit comment le bureau du procureur centrafricain avait identifié et interviewé les témoins et les victimes, ce qui a conduit l’accusation du pays à déterminer les personnes qu’ils pensaient responsables des crimes commis à Bangui et dans ses environs pendant les années 2002-2003.
L’accusation poursuivra l’interrogatoire de M. Feindiro demain matin.