Jean-Pierre Bemba in court
qui est Jean-Pierre Bemba Gombo

Par Wakabi Wairagala

Au cours des prochains mois, les juges de la Cour pénale internationale (CPI) prononceront des peines pour les cinq personnes reconnues coupables de subornation de témoins. L’ancien vice-président congolais Jean-Pierre Bemba, ses deux anciens avocats, un proche collaborateur qui est également membre du Parlement du Congo ainsi qu’un ancien témoin du procès pour crimes de guerre de M. Bemba devant la Cour sont les personnes en attente de leurs peines.

L’affaire de M. Bemba et de ses complices est la première de ce type jugée devant la CPI. Il y a d’autres affaires de subornation de témoins jugées devant la CPI, dont celle des kenyans Walter Barasa, Paul Gicheru et Philip Kipkoech Bett, pour lesquels la Cour a émis des mandats d’arrêt. Il y a eu également des allégations de subornation de témoins dans sept affaires qui ont atteint l’étape du procès devant la Cour.

L’article 70 de l’acte fondateur de la Cour, le Statut de Rome, établit les peines qui peuvent être prononcées à la suite d’une condamnation pour obstruction à la justice. Il prévoit que, après la condamnation, la Cour peut imposer une peine d’emprisonnement ne pouvant excéder cinq années, ou une amende prévue dans le Règlement de procédure et de preuve, ou les deux.

Dans la présente affaire, les accusés ont été déclarés coupables pour plusieurs délits différents. Aimé Kilolo-Musamba, l’avocat principal de M. Bemba jusqu’à son arrestation en novembre 2013, a été condamné pour avoir suborné 14 témoins, pour avoir présenté des faux témoignages de ces témoins et pour avoir encouragé leurs faux témoignages. Jean-Jacques Mangenda Kabongo, qui était chargé de la gestion des dossiers de la défense de M. Bemba, a été déclaré coupable pour les délits de subornation de 14 témoins, de complicité dans la présentation de faux témoignages de deux témoins et d’incitation à la présentation de faux témoignages de sept témoins.

Bemba lui-même a été reconnu coupable de subornation de 14 témoins et de sollicitation à apporter des faux témoignages. L’ancien témoin de la défense Narcisse Arido a été condamné pour subornation de quatre témoins tandis que Fidèle Babala Wandu, un législateur congolais et l’ancien chef de l’état-major de M. Bemba lorsqu’il était vice-président, a été déclaré coupable de subornation de trois témoins.

Un premier indice sur une peine probable, si les accusés étaient condamnés, était apparue en octobre 2014, lorsqu’un juge avait ordonné la mise en liberté provisoire des cinq personnes. Le juge unique Cuno Tarfusser avait affirmé que, puisqu’ils avaient été en détention pendant près d’une année, la détention continue des suspects avant le jugement serait « disproportionnée » par rapport aux peines encourues. Les accusés, à l’exception de M. Bemba qui a été depuis condamné à une peine de 18 ans de prison dans son procès principal, sont restés en liberté provisoire depuis lors.

À la suite de la décision de condamnation, des suggestions sur les peines à prononcer ont été faites aux audiences de détermination de peine en décembre 2016. Le procureur Fatou Bensouda a recommandé que M. Bemba et M. Kilolo soient condamnés à des peines uniques de huit ans de prison, M. Mangenda à sept ans, M. Arido à cinq ans et M. Babala à trois ans.

Les avocats de la défense ont toutefois soutenu que les accusés avaient déjà purgé des peines de prison adéquates et que les peines de prison devaient être égales au « temps passé » en détention, à savoir 11 mois. La défense de M. Arido a suggéré que cette peine devrait être « proportionnée aux délits et refléter la poursuite de l’intégration et de la contribution de M. Arido à la communauté et à sa famille ».

Selon la défense de M. Kilolo, toute peine de prison alternative supérieure à 11 mois devrait être suspendue. De plus, la défense a suggéré qu’aucune amende ne soit infligée à M. Kilolo ou que « seulement une amende limitée » lui soit imposée. Les avocats de la défense Michael G. Karnavas et Steven Powles ont argué que cette peine « était proportionnée aux délits et au degré de culpabilité de M. Kilolo et répondait aux objectifs de rétribution, de dissuasion et de réinsertion de la peine ».

Melinda Taylor, qui représente M. Bemba, a proposé qu’une peine qui lui était appropriée était une amende avec sursis ou un blâme public, considérant la nature de la condamnation en vertu de l’article 70, la « nature limitée » des conclusions des juges relatives à l’intention et à la conduite fautive de M. Bemba, à son rôle en tant qu’accusé détenu dans une procédure pénale et sa dépendance envers le conseil juridique de ses anciens avocats.

« M. Bemba a déjà été détenu pendant trois ans dans le cadre de l’affaire liée à l’article 70 (il est probable que cela sera quatre ans à la fin de la procédure), dans des conditions qui sont bien plus sévères que celles qui s’appliquent normalement à des délits de ce type », a soutenu Me Taylor. « Cela dépasse la peine maximale qui puisse être imposée en vertu de l’article 70 et dépasse largement la durée qui s’applique normalement à ce type de conduite concernée par l’affaire ».

Les avocats de M. Babala ont également suggéré que sa peine ne devrait pas dépasser les 11 mois qu’il avait passé en détention alors que les avocats de M. Mangenda ont proposé que, si les juges considéraient qu’il méritait une autre peine, ils devraient considérer des possibilités autres que l’incarcération.

Alors que les avocats de la défense affirment que les délits ne sont pas graves, l’accusation se distingue en soutenant que, contrairement à la vaste majorité des procédures pour outrage statuées devant des tribunaux ad hoc et hybrides, cette affaire ne concerne pas un incident individuel, dans lequel par exemple, des informations confidentielles ont été dévoilées ou lorsqu’un témoin a refusé de témoigner ou de répondre à des questions. Elle implique de nombreux délits contre l’administration de la justice commis au cours « d’efforts soutenus, délibérés et concertés » destinés à affaiblir le procès pour les crimes extrêmement graves de viol, de meurtre et de pillage portés à l’encontre de M. Bemba.

Par conséquent, l’accusation a recommandé que les personnes condamnées soient punies pour leurs multiples crimes respectifs, en vertu de l’article 70(3), ainsi que de l’article 78(3), qui prévoit que, lors de la détermination de la peine, les juges doivent prendre en compte des facteurs tels que la gravité du crime et les circonstances individuelles de la personne condamnée.

Par ailleurs, les avocats de la défense ont argué que le Statut de Rome distinguait les crimes et les délits, avec un régime de peines différent pour les « crimes principaux » relevant de l’article 5 du Statut (génocide, crimes contre l’humanité, crimes de guerre et agression) et pour les délits contre l’administration de la justice. Les avocats de la défense ont également soutenu que ces délits compromettaient la légitimité et l’intégrité de la Cour mais qu’il serait nettement disproportionné d’imposer des peines réservées aux crimes relevant de l’article 5.

Le procès, qui s’est ouvert le 29 septembre 2015, a entendu 13 témoin de l’accusation et 6 témoins de la défense avec des déclarations finales apportées le 31 mai et le 1er juin 2016. Les juges n’ont pas encore annoncé la date à laquelle ils prononceront les peines.

4 Commentaires
  1. De tout ce que l’accusation demande, y a t il un lien avec l’Affaire principale càd Procureure contre M.Bemba? A quand la suite du procès Bemba vs Procureure sur le Dossier de la RCA?

  2. Taignen
    Les experts militaires disaient que Bemba n’avait pas de capaciter a commander a partir de la Rdc.Il n’etait pas un chef militaire ou commandant donc il est innocent et il doit etre libre .

  3. Le dossier est en appel. Respectons ce que disent les experts militaires aussi.


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