Il est probable que le procès de Jean-Pierre Bemba qui se tient devant la Cour pénale internationale (CPI) entende le témoignage de certaines victimes des actes de violence commis par les soldats du Mouvement pour la libération du Congo (MLC) après que l’accusation ait déclaré sa preuve close.
Lorsque le procès reprendra le 18 janvier, les procureurs appelleront leurs quatre derniers témoins qui devraient clore leur témoignage durant le mois de février. Bien que les juges n’aient autorisé aucune victime à se présenter devant la Cour pour apporter son témoignage, ils ont indiqué que de telles dépositions seraient entendues avant que la défense ne débute la présentation de ses éléments. Le total des victimes participant au procès est de 1 861.
Les avocats des victimes ont demandé le mois dernier l’autorisation pour que 16 victimes témoignent. La défense et les procureurs ont cependant affirmé que ce nombre était trop important et que le fait d’autoriser l’ensemble des 16 témoins de témoigner prolongerait indûment le procès et entraînerait la présentation d’un nombre croissant de témoignages.
Les juges ont marqué leur accord, faisant remarquer qu’entendre la déposition des 16 victimes demanderaient 15 semaines et demie, en partant de l’hypothèse qu’il n’y aurait aucun retard dans le calendrier du procès. Ils ont déclaré que bien qu’il était important que la participation des victimes au procès ait un sens, une telle participation ne pouvait être préjudiciable ou incompatible avec les droits de l’accusé et à la tenue d’un procès équitable et impartial. Ils ont indiqué que des retards inutiles résultant de la présentation d’un nombre croissant de témoignages pourraient affecter le droit de l’accusé à être jugé sans délais anormaux.
Les juges ont demandé aux représentants légaux d’établir une liste de huit victimes au maximum qu’ils souhaiteraient appeler à la barre pour y apporter un témoignage oral. Cette liste devrait être soumise au plus tard le 23 janvier 2012 puis les juges décideront quelles victimes pourront comparaître.
M. Bemba, a été accusé de ne pas avoir empêché ou puni ses combattants qui auraient pillé, violé et tué des civils en République centrafricaine (RCA) pendant les années 2002 et 2003. Son procès, qui a débuté en novembre 2010, a entendu 36 témoins témoigner pour l’accusation. Les quatre témoins de l’accusation restants sont des anciens membres du MLC de M. Bemba.
Marie-Edith Douzima-Lawson, un des avocats des victimes, a expliqué que le témoignage de victimes pourrait dissiper des malentendus sur certains points, notamment sur la manière dont les crimes avaient été commis, sur l’identité des auteurs et sur la période exacte des évènements.
« Certaines victimes témoigneront sur la visite de M. Bemba à ses troupes dans leurs localités et les effets dévastateurs du comportement des Banyamulenge [soldats congolais] sur la population », a indiqué Mme Douzima-Lawson.
Elle a déclaré que les 15 témoins de l’accusation ayant un double statut (à la fois victimes et témoins) qui avaient témoigné lors du procès étaient originaires des environs de Bangui, la capitale de la RCA. Les victimes qui ont témoigné venaient de Damara, Sibut, Boali, Bossemgoa, Bozoum et Mongouma, des zones où les crimes étaient commis mais la défense a nié que le MLC puisse en être l’auteur.
L’accusation a convenu que les victimes provenant des zones en dehors de Bangui pourraient être en mesure d’éclairer l’affaire, comme les formes de crimes et les conséquences des attaques sur la population civile. « En ce sens, leur témoignage devrait compléter et non doubler les témoignages présentés par l’accusation », est-il indiqué dans un document de l’accusation.
Les juges ont ordonné que les huit victimes listées devront être celles qui, du point de vue des représentants légaux, sont :
(i) Les mieux placées pour contribuer à l’action de la Chambre qui œuvre à la manifestation de la vérité dans cette affaire ;
(ii) En mesure de présenter des témoignages et / ou des vues et préoccupations qui affectent l’intérêt personnel du plus grand nombre de victimes participantes ;
(iii) Les mieux placées pour présenter des témoignages qui ne seront pas des doublons de ceux qui ont été déjà présentés dans cette affaire, et
(iv) Désireuses que leur identité soit divulguée aux parties dans le cas où elles seraient autorisées à témoigner et / ou présenter leurs vues et préoccupations.
Outre les déclarations écrites décrites ci-dessus, les représentants légaux devront, pour chaque victime, expliquer :
(i) Le temps estimé nécessaire pour présenter le témoignage de la victime et /ou de ses vues et préoccupations ;
(ii) Si la victime souhaite que son identité soit divulguée aux parties dans le cas où elle serait autorisée à témoigner et / ou présenter ses vues et préoccupations.
(iii) Comment la présentation du témoignage de la victime et / ou de ses vues et préoccupations affecterait les intérêts généraux des victimes participant à cette affaire ;
(iv) La pertinence du témoignage de la victime par rapport aux charges ;
(v) La manière dont le témoignage de la victime pourrait contribuer à l’action de la Chambre qui œuvre à la manifestation de la vérité dans cette affaire, et
(vi) Les raisons pour lesquelles le témoignage de la victime ne serait pas un doublon des témoignages qui auraient été présentés à ce jour.