Jean-Pierre Bemba in court
qui est Jean-Pierre Bemba Gombo

Par Wakabi Wairagala

Aujourd’hui, le troisième témoin à comparaître au procès de l’ancien vice-président congolais Jean-Pierre Bemba a raconté comment les soldats du Mouvement pour la libération du Congo (MLC) avaient attaqué sa maison, l’avaient violé, avaient volé des canards et des chèvres et avaient abattu le chien.

M. Bemba a plaidé non coupable pour l’ensemble des cinq chefs d’accusation auxquels il doit répondre. Les procureurs soutiennent que M. Bemba est pénalement responsable des crimes de viol, de meurtre et de pillage commis par les troupes du MLC alors qu’elles étaient présentes sur le sol de la RCA en 2002 et 2003. La responsabilité pénale de M. Bemba, ont-ils affirmé, découle de son échec ou de son refus de punir ou d’arrêter ses troupes qui commettaient des atrocités sur les civils.

Le ‘‘témoin 22’’, qui a débuté sa déposition dans l’après-midi, a été décrit par le juge président Sylvia Steiner comme ‘‘très vulnérable’’ et a témoigné avec le visage et la voix déformés numériquement ainsi qu’avec un pseudonyme.

Elle a déclaré que le 26 octobre 2002, alors qu’elle se préparait à se rendre à la maison de prière, elle a entendu des cris et a vu des gens s’enfuir. Elle a réalisé que les troupes qui tentaient de renverser le président en exercice de la République centrafricaine (RCA), Ange-Félix Patassé, avaient attaqué la banlieue dans laquelle elle vivait et qu’ils tiraient en l’air.

Le témoin a déclaré que ces troupes n’ont commis aucune atrocité sur les civils. « Ils ont juste tiré en l’air avec leurs armes afin que les gens libèrent la route », a-t-elle précisé.

Mais les choses ont changé lorsque les soldats du MLC sont arrivés dans la banlieue PK 12 et ont chassé les rebelles qui tentaient de renverser le gouvernement du président Patassé.

« Nous ne sommes pas sortis de la maison. De toutes les femmes qui étaient dans notre maison, aucune n’est sortie », s’est remémoré le témoin. « Lorsque nous avions besoin de nourriture, c’était les hommes qui sortaient dehors pour nous trouver quelque chose à manger. Et c’est eux qui nous ont raconté ce qui se passait dehors ».

Le ‘‘témoin 22’’ a déclaré que les hommes leur ont indiqué que les troupes du MLC avaient occupé l‘ensemble du PK 12 et qu’ils commettaient des atrocités, violaient des personnes et faisaient tout ce qu’ils voulaient ».

Puis, un matin pluvieux, vers 4 ou 5 heures, des soldats congolais ont attaqué la maison où le témoin résidait. « Nous dormions encore et il pleuvait à verse. Nous avons entendu la porte être fracturée puis s’ouvrir et nous avons entendu des bruits de pas dans la maison », a-t-elle indiqué.

Le ‘‘témoin 22’’ a déclaré que bien que de nombreux soldats du MLC étaient entré dans sa chambre à coucher, seuls six d’entre eux restèrent ensuite dans la pièce. Ces derniers lui demandèrent de l’argent mais elle leur a répondu ne pas en avoir.

« Puis ils m’ont demandé de me coucher sur mon lit », s’est souvenu le témoin. Elle a indiqué avoir dit aux soldats qu’elle ne voulait pas faire ce qu’ils lui demandaient. « Je portais un short, une veste et un châle enroulé autour de moi. Il a pointé son arme sur moi et m’a jeté sur le lit et a pointé l’arme sur mon cou. Il a sorti un petit couteau, a déchiré mon short et ma culotte et les a jeté. Puis il écarté de force mes jambes et a couché avec moi ».

Elle a déclaré à la Cour que pendant que les soldats la violaient, les autres étaient aussi dans la pièce, cherchant quelque bien à emporter.

« Lorsque celui qui avait couché avec moi a eu fini, il s’est levé et est parti. Un autre l’a remplacé et a couché avec moi », a indiqué le témoin. « Après lui, un autre soldat a couché avec moi aussi, sur les six qui étaient entrés dans ma chambre, trois avaient couché avec moi ».

Le ‘‘témoin 22’’ a déclaré à la barre que, après que les trois soldats du MLC l’aient violé, ils l’ont emmené dans le salon pour rejoindre les autres membres de sa famille. Devant les membres de sa famille, les soldats ont ensuite demandé à une des femmes de son oncle de se déshabiller. Lorsqu’elle s’est déshabillée, ils se sont rendu compte qu’elle avait une maladie de peau et ils ne l’ont pas violé. Elle a indiqué que les soldats n’avaient pas violé l’autre femme de son oncle car elle était enceinte.

Le témoin a précisé que les soldats de M. Bemba avaient jeté son oncle de son lit malgré le fait qu’il souffrait de paralysie. Le témoin a déclaré que les soldats ne l’ont pas cru lorsqu’il leur a dit ne pas avoir d’argent à leur donner.

Alors qu’ils traînaient un autre de ses oncles hors de sa maison, les soldats auraient affirmé que le président Patassé leur aurait donné l’ordre de tuer tous les enfants âgés de 10 ans et plus. Le président leur aurait également déclaré que chaque personne ayant une clôture autour de sa maison hébergeait des rebelles et devait soit être tuée soit donner de l’argent aux soldats pour acheter sa liberté.

Le témoin a déclaré : « Nous avions des canards, des volailles, des chèvres et beaucoup d’autres animaux domestiques. Ils ont cassé la porte de l’étable dans laquelle les animaux étaient gardés et ils ont tout pris dans la maison principale. Nous avions une pièce dans laquelle nous conservions de la nourriture. Ils ont pris toute la nourriture après avoir défoncé la porte ».

Elle a poursuivi : « Dans la chambre de mon oncle le plus âgé, ils ont pris les habits et tout ce qu’ils pouvaient emporter ». Ensuite, ils ont emmené dehors un de mes oncles et ont déclaré que puisque nous ne voulions pas leur donner de l’argent, ils allaient le tuer et [ils] ont pointé une arme contre lui.

« Il était appuyé contre le mur de notre maison mais comme ils pointaient une arme vers lui, les chiens n’arrêtaient pas d’aboyer. Lorsqu’ils ont entendu tout ce vacarme, ils ont abattu un des chiens. Ils ont libéré mon oncle mais ils ont pris le chien et l’ont abattu ».

Le ‘‘témoin 22’’ poursuivra son témoignage demain après-midi.


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