Aujourd’hui, un témoin a déclaré aux juges de la Cour pénale internationale (CPI) que trois soldats appartenant à la milice de l’accusé Jean-Pierre Bemba l’avaient sodomisé en présence de ses femmes et de ses enfants.
Il a indiqué que pendant une période de quatre jours, les soldats congolais avaient violé à de nombreuses reprises ses enfants et ses femmes. « Lorsqu’ils avaient envie de coucher avec une femme, ils revenaient [chez moi] », a-t-il indiqué. Il a ajouté que les soldats avaient tué par balle une de ses femmes.
Témoignant au procès de l’ancien vice-président congolais, le témoin a déclaré que le calvaire de son viol avait duré quatre heures, de 10 heures du matin à deux heures de l’après-midi environ.
« Mes femmes et mes enfants étaient tous présents. La seule qui m’a laissée est celle qui a réussi à s’enfuir et l’autre, après qu’une fusillade soit survenue, s’est effondrée et est tombée immédiatement malade », a indiqué le ‘’témoin 23’’. La troisième [femme] est restée. Elle était là et a tout vu. Avec mes femmes et mes enfants, nous avons subi tout cela ».
Le procureur Thomas Bifwoli a demandé au témoin ce qu’il avait ressenti après avoir été violé devant ses femmes et ses enfants
« J’ai eu l’impression de mourir », a répondu le témoin. « Ensuite, chaque fois que je voyais un zaïrois [congolais], je ressentais toujours l’envie de l’attraper et de l’étrangler. Mais je ne peux rien faire ».
« Vous ont-ils violés à tour de rôle ou en même temps ? », a demandé M. Bifwoli.
Le témoin a répondu, « Le premier a couché avec moi et a éjaculé en moi. Puis le second est venu pour faire la même chose. Il a éjaculé en moi. Et, pour terminer, le troisième a fait la même chose que les deux précédents ».
Lorsque M. Bifwoli a demandé au témoin des précisions sur l’agression, le juge président Sylvia Steiner a fait remarquer : « L’avocat de l’accusation est libre de poursuivre ses questions mais nous [l’]informons que les détails physiques de l’agression qui ont été donnés satisfont la Cour ». Elle a conseillé à l’avocat de l’accusation d’éviter de poser des questions indiscrètes.
L’avocat de M. Bemba, Nkwebe Richard Liriss, a indiqué que la défense était également satisfaite des explications fournies par le témoin.
Dans son exposé introductif présenté au début du procès de M. Bemba, fin novembre, le procureur de la CPI Luis Moreno-Ocampo a déclaré que des soldats du Mouvement pour la libération du Congo (MLC) avaient violé des hommes en public afin d’anéantir leur autorité ainsi que leur capacité à diriger. « Le message qui sous-tend ces viols est particulièrement évident de la part du MLC par le ciblage et la sélection des hommes violés, des hommes ayant tous des postes de responsabilité, des dirigeants locaux qui protègent la collectivité.
M. Moreno-Ocampo a ensuite indiqué que le ‘‘témoin 23’’ était un chef local qui s’était présenté aux soldats de M. Bemba en tant que représentant de son village. Il a précisé que les soldats avaient répondu : « Parfait, vous êtes exactement le type de personne que nous recherchons parce que vous protégez les rebelles » et ils l’ont ensuite violé ainsi que les membres de sa famille.
L’accusation soutient que M. Bemba a sciemment laissé les 1 500 hommes armés qu’il aurait commandés et contrôlés commettre des centaines de viols et de pillages. Ce dernier a nié les cinq chefs d’accusation retenus contre lui.
Le témoin d’aujourd’hui, qui témoignait avec le visage et la voix déformés numériquement, a donné l’essentiel de son témoignage à huis clos. Il a également déclaré, en séance publique, que les soldats de M. Bemba avaient pris son véhicule, son moulin à tapioca et son générateur parmi d’autres biens de valeur. « J’étais une personne comblée et je me retrouve sans rien », a-t-il déclaré.
Le « témoin 23 » poursuivra sa déposition lundi.