Jean-Pierre Bemba in court
qui est Jean-Pierre Bemba Gombo

Par Wakabi Wairagala

Aujourd’hui, un témoin a imputé au personnel du bureau du procureur de la Cour pénale internationale (CPI) les incohérences présentes dans sa demande de participation en tant que victime au procès de l’ancien vice-président Jean-Pierre Bemba.

Le ‘‘témoin 73’’ a également indiqué qu’une personne, qui prétendait travailler avec la Cour, lui avait conseillé de falsifier la valeur des biens perdus à cause des soldats de M. Bemba afin de gonfler ses demandes de réparations.

Le juge président Sylvia Steiner a déclaré au témoin qu’un récit manuscrit joint à son formulaire de demande de participer au procès de M. Bemba indiquait que les soldats du Mouvement pour la libération du Congo (MLC) avaient pénétré dans sa maison, avaient jeté sa fille mineure au sol et l’avaient violée. Le juge a souligné le fait que, dans son témoignage oral, le témoin avait déclaré que les soldats congolais n’avaient ni agressé ni violé sa fille.

Le témoin a répondu que la version dans sa demande était erronée. « Lorsqu’ils sont entrés [dans la maison], ils n’ont pas croisé ma fille dans la maison … ma femme et moi-même étions dans la maison, ma fille n’était pas présente », a affirmé le témoin.

Il a ajouté, « Ce qui est certain, c’est qu’ils ont couché avec elle. Mais je ne peux accepter que l’on dise qu’elle a été jetée à terre et violée. Ma fille n’était pas dans la maison à ce moment-là. Ils ne l’ont pas violée ou brutalisée dans ma maison ».

Le juge Steiner a demandé au ‘‘témoin 73’’ de préciser qui l’avait aidé à remplir le formulaire.

« La personne qui a rempli ce formulaire était un des enquêteurs du BdP [Bureau du procureur à la CPI], celui qui a eu un entretien avec moi », a répondu le témoin.

Le témoin a également déclaré qu’il était faux que le formulaire, qu’il avait reconnu porter sa signature, avait été rempli en mars 2010 tel qu’indiqué. « Ce formulaire de demande, je l’ai rempli en 2008. C’était en 2008 », a-t-il indiqué.

Les procureurs de la CPI affirment que M. Bemba, en tant que commandant militaire du MLC, est responsable des meurtres, viols et pillages commis par ses troupes en République centrafricaine (RCA). Les troupes étaient présentes dans le pays pour aider le président de l’époque, Ange-Félix Patassé, à combattre une tentative de coup d’état.

Lors de son contre-interrogatoire mené par la défense, un autre document manuscrit mentionnant une somme d’argent a été montrée au témoin. Le témoin a déclaré que bien que le document portait sa signature, il ne l’avait pas écrit personnellement. Interrogé par l’avocat de la défense Peter Haynes qui en a pris note, le ‘‘témoin 73’’ a déclaré qu’il s’agissait d’une personne qui s’était identifiée dans le quartier où le témoin vivait comme étant un envoyé du département de la CPI en charge des réparations aux victimes.

Cette personne, qui transportait avec elle des documents, réalisait un inventaire des biens des victimes qui auraient été pillés par les soldats du MLC ou que les victimes auraient perdu à l’époque où le MLC était engagé dans le conflit de la RCA en 2002 et 2003. Le témoin avait rencontré cette personne dans la maison de son voisin alors qu’il aidait son voisin et son fils à remplir des formulaires.

Le ‘‘témoin 73’’ a affirmé que c’était son voisin qui l’avait présenté au fonctionnaire de la CPI en question en tant que victime des soldats du MLC. Dans son témoignage de cette semaine, le ‘‘témoin 73’’ a raconté que son voisin avait été battu, sa fille de dix ans violée et son fils torturé et placé en détention par les soldats du MLC.

Le témoin a également relaté qu’une personne, qui prétendait être du bureau des réparations de la CPI, lui avait demandé de gonfler les marchandises que lui avaient pris les soldats du MLC.

« Je lui ai dit que ma femme vendait des boissons et de la bière et que ces personnes [les soldats du MLC] avaient bu à crédit sans payer, qu’ils avaient demandé que l’on leur serve de la nourriture sans la payer, qu’ils avaient pris 30 000 francs à ma femme », a déclaré le témoin. Il a ajouté qu’il avait dit au présumé fonctionnaire de la CPI que les soldats du MLC lui avaient vendu un poste de radio qu’ils avaient ensuite repris sans rendre l’argent qu’il avait donné.

Selon le ‘‘témoin 73’’, cette personne lui avait conseillé de déclarer un montant de 300 000 francs au lieu des 30 000 francs que sa femme avait perdu. Cette personne lui aurait également conseillé de déclarer qu’il avait perdu un poste de télévision à la place d’un poste de radio.

« Il m’a dit : Mais écoutez, les gens mentionnent de grosses sommes d’argent et vous ne citez que de petites sommes. Vous ne voulez pas une part du gâteau ? ». La personne a fait d’elle-même des propositions et a rempli le document », a indiqué le témoin. Il n’a pas été possible de déterminer le montant que le témoin avait finalement déclaré sur ce formulaire.

Le reste de la déposition du ‘‘témoin 73’’ s’est déroulé à huis clos. Il n’a pas été clairement indiqué si son témoignage était terminé.

Les victimes participant aux procès de la CPI peuvent demander des compensations et des indemnisations pour les pertes et les dommages subis si l’accusé est déclaré coupable. Si le coupable n’a pas de ressources financières, le Fonds de compensation des victimes de la Cour peut être utilisé pour payer les indemnisations. Plus d’un millier de personnes participent en tant que victimes au procès Bemba.

Le procès devrait se poursuivre demain matin.


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