Jean-Pierre Bemba in court
qui est Jean-Pierre Bemba Gombo

Par Wakabi Wairagala

Les avocats représentant Jean-Pierre Bemba au procès pour crimes de guerre qui se tient devant la Cour pénale internationale (CPI) ont souligné aujourd’hui les divergences entre la déposition du témoin de l’accusation et les déclarations de son épouse.

La défense de M. Bemba a également interrogé le ‘‘témoin 69’’ sur les différences entre les évènements entourant son agression présumée par les soldats appartenant à la milice de l’accusé tels qu’il les a décrit aux enquêteurs de la CPI et la manière dont il les a raconté de nouveau devant la Cour.

Le ‘‘témoin 69’’ a débuté lundi son témoignage devant le tribunal basé à La Haye. Il a indiqué au procès que des soldats appartenant au Mouvement pour la libération du Congo (MLC) avaient tué sa sœur, violé sa femme et l’avaient sodomisé en novembre 2002. L’attaque aurait eu lieue à Begua, une ville de République centrafricaine (RCA).

Le témoin a déclaré que, lors de cette agression, une balle l’avait atteint à la cheville et que, après avoir été tabassé par un soldat, il souffrait de troubles permanents de la vue.

Cependant, dans une déclaration lue devant la Cour cet après-midi, la femme du témoin aurait déclaré que son mari et leurs enfants avaient fui la maison à 16h le jour où les soldats congolais étaient arrivés dans leur quartier. Elle aurait affirmé que cinq soldats armés l’avaient violée tandis que les autres volaient « divers biens » dans la maison. Elle aurait indiqué que les soldats l’avaient ensuite libérée mais avaient continué d’occuper sa maison pendant cinq mois.

« C’est une femme, je suis un homme. Elle ne sait rien. J’ai une parfaite connaissance des détails [des évènements] », a expliqué le témoin tandis qu’il essayait de justifier les divergences existant entre les deux récits.

La femme du témoin n’a également fait aucune mention de la sodomisation de son mari ou du meurtre de sa sœur, deux évènements qui ont été au cœur de son témoignage. Le ‘‘témoin 69’’ a répondu que sa femme « avait son histoire à raconter » et qu’il avait la sienne. « Ma femme est aussi illettrée que je le suis », a-t-il ajouté.

En outre, dans une déclaration de 2008 faite aux enquêteurs de la CPI, également lue devant la Cour aujourd’hui, le témoin aurait déclaré avoir reçu une balle dans la cheville par des soldats congolais, être tombé sur des pierres et avoir été frappé à l’œil gauche. Toutefois, dans cette déclaration, le témoin n’a pas cité sa présumée sodomisation.

Interrogé par l’avocat de la défense Peter Haynes pour savoir pourquoi il n’avait pas mentionné aux enquêteurs de la CPI qu’il avait été sodomisé et frappé à l’œil, au lieu de dire qu’il était tombé sur des pierres, le ‘‘témoin 69’’ a attribué ces divergences à des erreurs de transcription de son témoignage oral.

« La personne qui a établit ce document a mal compris. Les gens font des erreurs », a-t-il ajouté.

M. Bemba est le quatrième citoyen congolais à être jugé devant la CPI. Il est poursuivi pour manquement à contrôler ou à punir ses troupes alors qu’elles mettaient à sac le pays voisin pendant les années 2002 et 2003. Il a nié les deux crimes contre l’humanité (viol et meurtre) et les trois crimes de guerre (viol, meurtre et pillage).

Aujourd’hui également, la défense de M. Bemba a soutenu qu’un intermédiaire d’une organisation non gouvernementale centrafricaine qui travaillait avec un grand nombre de victimes participant au procès avait exigé de l’argent afin de les aider à compléter leurs formulaires de demande, à établir la liste de leurs biens disparus et à rédiger une première version de leurs réclamations.

« Cela vous surprendrait-il que nous ayons entendu parler du fait que certaines personnes ont demandé de l’argent pour remplir les formulaires de demande pour les victimes ? Dans votre zone, l’homme qui a fait ce genre de chose était un intermédiaire de l’OCODEFAD dénommé Emmanuel », s’est enquit Mr. Haynes.

« Je ne connais pas ce monsieur, je ne l’ai jamais vu », a répondu le témoin. Il a ajouté que les enfants des victimes qui étaient « scolarisés » étaient ceux qui aidaient leurs parents.

L’Organisation pour la compassion et le développement des familles en détresse ou l’OCODEFAD, est une organisation fondée par Bernadette Sayo, un ministre de l’actuel gouvernement centrafricain. La défense a interrogé beaucoup de témoins pour savoir si les fonctionnaires de l’OCODEFAD les avaient conseillés sur ce qu’ils devaient déclarer aux enquêteurs de la CPI.


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