Jean-Pierre Bemba in court
qui est Jean-Pierre Bemba Gombo

Par Wakabi Wairagala

Jean-Pierre Bemba souhaite la récusation de juges de la Cour pénale internationale (CPI) appartenant à la commission qui déterminera les réparations qu’il aura à payer aux victimes de ses crimes. L’ancien vice-président congolais, qui purge une peine de 18 ans de prison pour des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité commis en République centrafricaine (CAR), accuse les juges de partialité.

Selon l’avocat de la défense Peter Haynes, étant donné les motifs des décisions émises par la Chambre de première instance III dans la conduite de la procédure de réparation, « la perception raisonnable d’une prédétermination » à l’égard de M. Bemba s’est fait jour. Me Haynes a demandé que lors d’une session plénière les juges examinent la demande de M. Bemba de récuser des juges en vertu de l’article 41(2) du Statut de la Cour.

Au moment de la demande initiale de récusation déposée par M. Bemba, la Chambre de première instance III était composée des juges Joyce Aluoch, Geoffrey Henderson et Chang-ho Chung. Avec l’élection et le serment de six nouveaux juges à la CPI cette année, la Chambre a été depuis recomposée. La juge Kimberly Prost a remplacé le juge Aluoch dans la formation de la Chambre de première instance III. Par conséquent, la demande de récusation ne s’appliquera probablement qu’aux juges Henderson et Chung. Le mandat de neuf ans du juge Aluoch en tant que juge de la CPI s’est terminé au début du mois.

L’article 41(2)(a) prévoit qu’un juge ne peut participer à une affaire dans laquelle son impartialité pourrait raisonnablement être mise en doute pour un motif quelconque. L’article 41(2)(b) permet à une personne poursuivie de demander la récusation d’un juge. En vertu de l’article 41(2)(c), la récusation d’un juge est décidée à la majorité absolue par une commission composée de tous les juges, à l’exception du juge qui est remis en cause.

En juin 2013, les juges de la CPI avaient rejeté l’appel de Thomas Lubanga pour récuser le juge Sang-Hyun Song de la formation instruisant son appel de sa condamnation et de sa peine de 14 ans de prison. Les juges ont déclaré qu’ils n’avaient trouvé aucun fondement aux affirmations de M. Lubanga selon lesquelles le juge Song était partial. Dans sa demande de récusation, la défense a déclaré que certaines déclarations publiques faites par le juge Song avaient affecté négativement la perception de son impartialité ou potentiellement démontré sa partialité.

Dans sa demande de récusation, Me Haynes a estimé que la prédisposition de la Chambre de première instance III était centrale dans sa détermination de prononcer une ordonnance de réparation avant la décision sur l’appel de M. Bemba de sa condamnation. Il a ajouté, « Il n’y a aucune justification pour qu’une ordonnance de réparation précède la condamnation dans cette affaire ni que cela soit rapproché d’une pratique antérieure de la CPI, ou que le droit de toute personne condamnée de faire examiner sa condamnation par une juridiction supérieure soit conforme avec la loi ».

Me Haynes a déclaré que les juges avaient révélé leur intention de délivrer une ordonnance de réparation monétaire à l’encontre de M. Bemba avant son jugement en appel, bien qu’ils aient indiqué préalablement qu’ils ne prononceraient pas d’ordonnance avant la décision sur l’appel de la condamnation. Il a également précisé que la Chambre de première instance III avait accéléré le processus de réparations et avait ainsi refusé à M. Bemba l’opportunité de commenter chaque demande de réparation, comme cela fut le cas devant la Cour. Les audiences d’appel ont eu lieu en janvier dernier et les juges devraient bientôt délivrer leur décision.

Me Haynes a également remis en cause la Chambre de première instance III pour avoir exclu la défense de deux réunions tenues en décembre 2016 qui, selon lui, abordaient la question des réparations. Le personnel en charge des poursuites dans l’affaire Bemba, les avocats des victimes et les fonctionnaires du Fonds au profit des victimes auraient assisté aux deux réunions avec les juges. L’exclusion de la défense et le manquement à ordonner la divulgation du rapport de ces réunions dans un délai raisonnable « a compromis l’équité de la procédure de réparations et donné lieu à un soupçon raisonnable de partialité », a déclaré Me Haynes.

Les avocats de la défense soutiennent que le fait que la Chambre ait permis aux avocats des victimes d’informer les experts indépendants qui ont été désignés par les juges pour les conseiller sur la détermination des réparations constitue un autre motif permettant d’affirmer la partialité des juges envers M. Bemba. Me Haynes a estimé que la défense n’avait pas accès aux experts, ce qui était contraire à la justice naturelle.

La Présidence devrait se prononcer sur la demande de la défense le moment venu.


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