Aujourd’hui, le deuxième témoin appelé par la défense de Jean-Pierre Bemba a déclaré que l’intervention des troupes de l’accusé lors du conflit qui a ravagé la République centrafricaine (RCA) en 2002-2003 était « légitime » et destinée en partie à protéger la sécurité nationale du Congo.
Octave Dioba, un expert en géopolitique, a brossé le contexte de ce conflit et a décrit l’histoire politique troublée de la République démocratique du Congo (RDC) et de la RCA.
M. Bemba est jugé pour manquement à contrôler ses soldats déchaînés du Mouvement pour la libération du Congo (MLC) qui auraient commis des actes de violence sur les civils en RCA. Les soldats étaient présents dans le pays pour aider le président de l’époque, Ange-Félix Patassé, à combattre une tentative de coup d’état.
M. Dioba a expliqué qu’en 2002, le gouvernement congolais ne contrôlait pas totalement son vaste pays. La milice de M. Bemba contrôlait le nord du Congo tandis qu’une autre force rebelle, le Rassemblement pour la démocratie congolaise (RDC) contrôlait l’est du pays. En 1999, les factions belligérantes avaient signé l’accord de Lusaka que l’avocat de la défense Aimé Kilolo-Musamba a présenté à la Cour.
L’expert a indiqué que cet accord avait légitimé les factions combattantes et leur avait conféré les pouvoirs en matière d’administration des territoires qu’elles contrôlaient. De plus, les signataires s’étaient engagés à trouver des solutions aux problèmes de sécurité du Congo et à garantir la sécurité des frontières du pays. Á la suite de cet accord de partage des pouvoirs, les forces rebelles furent intégrées à l’armée nationale et M. Bemba devint un des vice-présidents du Congo.
M. Dioba a déclaré qu’il était « clair et précis » que les parties avaient convenu de mener une action militaire le long des frontières du Congo pour assurer la sécurité du pays.
« La RDC et la RCA ont une frontière commune, par conséquent l’armée du MLC devait surveiller cette frontière de même que la RDC devait surveiller la frontière est avec le Rwanda », a indiqué le témoin.
L’expert a affirmé que les coups d’état étaient la « méthode préférée » pour se hisser à la présidence en RCA. Il a décrit le renversement du premier président du pays, David Dacko, par Jean-Bédel Bokassa en 1965. Il a précisé, qu’en 1979, M. Dacko avait repris le pouvoir après avoir renversé le régime de Bokassa. Deux ans plus tard, un coup d’état mené par André Kolingba avait évincé M. Dacko. Le président Patassé, démocratiquement élu, qui était arrivé au pouvoir en 1993, a fait face à deux rébellions. M. Koliga a tenté un coup d’état infructueux en 2001 mais la seconde tentative, menée par François Bozizé, l’actuel président du pays, a réussi en mars 2003.
Tout en reconnaissant la participation de ses troupes au conflit, M. Bemba a nié l’ensemble des cinq charges retenues à son encontre par la Cour pénale internationale (CPI). Il a soutenu que, une fois que ses troupes avaient franchi la frontière congolaise, elles n’étaient plus sous son commandement mais sous celui de M. Patassé.
Dans son exposé introductif, la défense de M. Bemba a affirmé que, à l’époque où le MLC était déployé dans le pays voisin, il ne s’agissait pas d’une milice privé mais « d’une autorité reconnue par la communauté internationale » dont l’intervention s’appuyait sur une résolution de l’Union africaine.
M. Dioba poursuivra son témoignage demain matin.