Jean-Pierre Bemba in court
qui est Jean-Pierre Bemba Gombo

Par Wakabi Wairagala

Jeudi, un témoin déposant en faveur de Jean-Pierre Bemba devant la Cour pénale internationale (CPI) a déclaré que les comptes rendus des médias sur les crimes qui auraient été commis par la milice de l’accusé étaient basés sur des rumeurs plutôt que sur des enquêtes sur le terrain. Il a également indiqué qu’il aurait été « irrationnel » pour des soldats appartenant à la milice de l’accusé de commettre certains des crimes dont les procureurs les accusent.

Le ‘‘témoin D04-21’’ a déclaré qu’un compte rendu de Radio France International (RFI), qui mentionnait les soldats du Mouvement pour la libération du Congo (MLC) parmi les auteurs des crimes, était basé sur des « appels téléphoniques anonymes ». « Ils ne sont pas allés sur le terrain. Lorsque la délégation du MLC est arrivée sur place, les informations obtenues ont été différentes », a t-il indiqué.

L’avocat de l’accusation Jean-Jacques Badibanga a fait écouter une émission radio de RFI diffusée le 18 février 2003, deux jours avant qu’une délégation du MLC ne visite Sibut en République centrafricaine (RCA) pour faire une enquête sur les violations des droits de l’homme par les soldats du groupe. L’émission citait les troupes de M. Bemba comme étant les auteurs de crimes perpétrés dans un certain nombre de villes, dont Sibut.

« Comment se fait-il que quelques jours après que les journalistes de RFI aient mené des enquêtes, la délégation du MLC arrive avec des journalistes de RFI dans leur sillage et que les informations collectées ne soient pas les mêmes ? », a demandé M. Badibanga.

Le témoin a indiqué que les journalistes ne parlaient que des informations qui leur parvenaient mais qu’ils ne se rendaient pas sur le terrain pour vérifier les comptes rendus des crimes commis. Il a expliqué que, malgré la présence de soldats du MLC armés en arrière-plan, les interviewés filmés dans différentes vidéo de RFI prises au moment de la visite de la délégation à Sibut s’exprimaient librement et avaient même mentionné certains actes commis par des soldats congolais.

Le témoin, un ancien membre du MLC, témoigne via un lien vidéo depuis un lieu dont le nom n’a pas été divulgué. Des mesures de protection lui ont été accordées, notamment l’utilisation d’un pseudonyme et la déformation numérique de la voix et du visage pour protéger son identité.

M. Bemba, un ancien vice-président de la République démocratique du Congo, est jugé pour manquement présumé à contenir ses soldats qui ont agressé des civils centrafricains. Il a plaidé non coupable de trois chefs de crimes de guerre et de deux chefs de crimes contre l’humanité que les procureurs affirment avoir été commis en 2002 et 2003.

Le témoin a également déclaré qu’il était inconcevable que des soldats en service puissent détruire des certificats de naissance alors qu’ils pillaient les maisons des civils. Il a répondu à des extraits du témoignage d’un témoin anonyme qui avait comparu devant la Cour et qui avait relaté des évènements s’étant déroulés à Sibut.

Dans les extraits de ce témoignage, qui ont été lus devant la Cour aujourd’hui, la personne affirmait que les soldats de M. Bemba avaient pillé sa maison et avaient déchiré les certificats de naissance de ses enfants. Elle a également soutenu que les troupes avaient abattu un des habitants de la ville, violé des filles âgées de dix ans et avaient enlevé d’autres filles pendant deux ou trois jours.

« Lorsque l’on vous a demandé pourquoi le MLC menait des enquêtes à Sibut, vous avez indiqué que c’était en rapport avec les rumeurs. Est-ce que le [témoignage de cette personne] est en quelque sorte une rumeur », a demandé M. Badibanga.

« Les rumeurs n’ont pas de rapport avec ce que vous venez de lire », a répliqué le témoin. « Je pense que ce témoignage qui cite la destruction de certificats de naissance est plutôt discutable ».

Dans son témoignage antérieur, le témoin avait déclaré que M. Bemba avait ordonné une commission pour enquêter la conduite des soldats après avoir reçu un rapport faisant état de violations de droits de l’homme. Le ‘‘témoin D04-21’’ a déclaré que des membres de la commission s’étaient rendus à Sibut et avaient interviewé un certain nombre d’habitants, dont aucun n’avait signalé de crimes commis par les troupes du MLC, hormis le vol de vêtements et de bicyclettes par quatre soldats.

Les journalistes qui accompagnaient la délégation avaient enregistré les interviews. Les images vidéo, dans lesquelles les habitants de Sibut exprimaient leur gratitude au MLC pour « les avoir libérés » a été au centre du témoignage du ‘‘témoin D04-21’’ depuis lundi, lorsqu’il s’est présenté à la barre des témoins.

Les audiences devraient se poursuivre demain matin avec la suite du témoignage du ‘‘témoin D04-21’’.

 


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