Jean-Pierre Bemba in court
qui est Jean-Pierre Bemba Gombo

Par Wakabi Wairagala

Le chef d’opposition congolais Jean-Pierre Bemba a décidé de faire appel de la peine qui a été prononcée à son encontre le mois dernier devant la Cour pénale internationale (CPI) pour subornation de témoin, la qualifiant d’injuste et disproportionnée. L’ancien commandant rebelle, âgé de 55 ans, a reçu une peine de 12 mois, qu’il ne purgera pas puisqu’il a passé une période plus longue en détention lors de son procès, et une amende de 300 000 € (346 000 dollars US).

Dans un avis d’appel datant du 18 octobre, l’avocat de M. Bemba, Melinda Taylor, a invoqué trois motifs d’appel et a déclaré que la défense demanderait à la Chambre d’appel d’annuler la peine et de clore l’affaire engagée à l’encontre de M. Bemba.

Le 17 septembre 2018, les juges de la Chambre de première instance VII ont prononcé de nouvelles peines pour M. Bemba et ses anciens avocats, Aimé Kilolo Musamba et Jean-Jacques Mangenda Kabongo. Les trois personnes avaient été condamnées en octobre 2016 pour avoir sollicité de faux témoignages et suborné 14 témoins qui ont témoigné en faveur de M. Bemba lors de son procès principal pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. M. Bemba a été acquitté dans ce procès en juin dernier.

Les peines annoncées le mois dernier ont été les mêmes que celles décidées par la Chambre de première instance VII en mars de l’année dernière, avant que la Chambre d’appel n’ordonne une nouvelle peine après avoir conclu que le décision sur la peine renfermait des erreurs.

Lorsqu’il a prononcé la décision sur la nouvelle peine, le juge président de la Chambre de première instance VII, Bertram Schmitt, a affirmé que la chambre n’avait pas jugé approprié de s’écarter des peines prononcées précédemment. Il a indiqué que les juges avaient estimé que les considérations antérieures en matière de peine restaient en grande partie pertinentes, même après que la décision en appel ait annulé les peines. Cela est dû au fait que la Chambre d’appel « n’avait trouvé des erreurs que sur des points mineurs » dans la décision sur la peine précédente.

Toutefois, dans le premier motif d’appel, l’avocat de la défense Me Taylor a critiqué la Chambre de première instance pour son défaut de se conformer à la directive de la Chambre d’appel lors du prononcé d’une détermination concrète du degré de participation de M. Bemba et des préjudices causés par le conflit. Elle a indiqué que cette erreur entraînait une peine disproportionnée pour M. Bemba.

Par conséquent, la défense demandera à la Chambre d’appel d’exercer son pouvoir en vertu de l’article 81(2)(b) afin d’annuler les condamnations de M. Bemba qu’elle affirme reposer sur des preuves erronées. Cet article prévoit que, si lors d’un appel contre une peine prononcée, la Cour estime qu’il existe des motifs qui pourraient justifier l’annulation de tout ou partie de la décision sur la culpabilité, la Chambre d’appel peut prononcer une décision sur la culpabilité.

Me Taylor a soutenu que, lors du prononcé de la nouvelle peine, la Chambre de première instance avait reproduit les erreurs qu’elle avait faite lors de sa décision sur la peine initiale. Les erreurs présumées comprennent un manquement à émettre une « détermination factuelle des préjudices causés par les faux témoignages » et la « décision arbitraire » des juges d’augmenter leur détermination de la gravité qu’ils liaient à l’infraction d’apporter de faux témoignages.

Ensuite, Me Taylor a déclaré que les juges avaient commis une erreur en évaluant le montant de l’amende de M. Bemba sur la base de ses moyens et non sur sa culpabilité. Alors que M. Bemba s’est vu imposé une amende de 300 000 €, son ancien avocat M. Kilolo, qui a été condamné pour les mêmes infractions, a reçu une amende de 30 000 €. Les juges ont expliqué que, puisque M. Bemba avait « considérablement plus de moyens » que M. Kilolo, son amende substantiellement supérieure devrait avoir un « effet dissuasif équivalent ».

Dans le deuxième motif d’appel, la défense a déclaré que les juges abusaient de leur pouvoir discrétionnaire et avaient commis une erreur de droit en omettant de suspendre la procédure,d’ acquitter M. Bemba ou de fournir un moyen de recours pour « l’effet cumulé des violations flagrantes » de ses droits. Me Taylor cite « la durée excessive et arbitraire de la détention » de M. Bemba ainsi que « les déclarations incendiaires et hautement préjudiciables » de l’accusation, notamment celles selon lesquelles elle avait tenté de s’opposer à l’acquittement dans le procès principal de M. Bemba.

Selon elle, ces violations affecteraient l’équité de la procédure et ont entraîné une peine disproportionnée. Elle a ajouté que le recours approprié serait d’accorder à M. Bemba une libération inconditionnelle, après la clôture de la procédure engagée à son encontre et la révocation de sa condamnation.

Me Taylor a déclaré que la libération de M. Bemba le 12 juin 2018 n’avait pas compensé l’étendue du préjudice causé par le fait que sa détention était au moins quatre fois et demi plus importante que la durée jugée appropriée à sa culpabilité et qu’elle survenait plus de trois ans et demi après que le juge unique ait déjà décidé que la durée avait cessée d’être raisonnable et proportionnée.

Dans le troisième motif d’appel, la défense affirme que le procès imposait une peine disproportionnée, qui dépassait le niveau de sa culpabilité lorsque l’on examinait l’ensemble de la peine que M. Bemba avait subi.


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